Impact médiatique : avez-vous la foi le dimanche?
Dimanche, c’est le Jour du Seigneur pour les croyants catholiques. Mais c’est aussi une journée stratégique pour plusieurs experts en communication.
Avant de vous expliquer pourquoi, analysons ensemble le portrait médiatique.
La couverture médiatique la fin de semaine au Québec
Avez-vous déjà syntonisé les chaînes d’information continue la fin de semaine? Avez-vous remarqué que les bulletins de nouvelles du week-end ont toujours du contenu à nous présenter même s’il ne se passe parfois « rien »? Si vous ne regardez pas la télévision la fin de semaine, vous remarquerez que les médias dont vous êtes abonnés sur Facebook et Twitter continuent de vous alimenter avec des nouvelles sur votre fil d’actualité.
Par exemple, dimanche le 30 avril, la première nouvelle diffusée à LCN à 10h00 était un fait divers. La même nouvelle n’aurait certainement pas eu le même traitement quelques jours plus tôt lorsque le gouvernement Couillard était éclaboussé par l’affaire Bibeau.
La fin de semaine, les sujets couverts par les médias peuvent vous sembler plus légers et avec raison. La couverture est souvent axée sur les faits saillants des événements de la semaine, les sports (surtout les Canadiens et Carey Price lorsqu’ils ne sont pas éliminés hâtivement!), les déclarations de Donald Trump, les arts et spectacles, la météo et les faits divers.
Pourquoi parle-t-on d’une « agression à main armée survenue à Laval la nuit dernière » alors que le même média n’en aurait même pas parlé un mercredi matin durant l’heure de pointe? Parce que c’est la fin de semaine. Parce qu’il y a « moins de nouvelles »!
Comment se fait-il que des chefs syndicaux et des politiciens apparaissent dans votre écran de télévision un dimanche matin à 11h00? Ils ne prennent pas congé ces gens-là? Parce que c’est la fin de semaine!
Parce qu’ils ont choisi le dimanche pour passer leur message.
Parce qu’ils veulent profiter de la disponibilité des médias.
Parce qu’ils veulent avoir un impact médiatique.
Lors de mes quatre années en politique, j’ai découvert la force de frappe d’une sortie médiatique le dimanche. Oui, oui… Vous avez bien lu. Le dimanche.
En politique, que vous soyez au gouvernement ou dans l’opposition, c’est un véritable défi d’attirer l’attention des médias sur tout enjeu qui touche de près ou de loin l’opinion publique. Si l’enjeu en question est moins percutant aux yeux du médias, c’est encore plus difficile d’engendrer une couverture avec un impact médiatique. Parfois, la nouvelle, qui paraît moins « spectaculaire », perce difficilement l’actualité durant la semaine, suscitant l’indifférence des médias. Et je peux vous le dire, ça devient frustrant.
C’est la raison pour laquelle plusieurs stratèges tentent leur chance en organisant une annonce le dimanche, le jour le moins fertile de la semaine en actualité. Le 30 avril dernier, le ministre Pierre Moreau a utilisé cette stratégie en convoquant les médias pour annoncer la construction d’un nouveau pont Mercier dans la région de Montréal. Et ça a fonctionné.
Une sortie médiatique le dimanche : 3 avantages-clés
Voici 3 raisons qui vous inciteront à choisir le dimanche pour votre prochaine sortie médiatique :
1) Vous augmentez vos chances d’obtenir plus de visibilité et d’avoir un impact médiatique.
Sortir dans les médias un dimanche peut vous procurer plus de visibilité et d’exposure qu’un jour de semaine. Pourquoi? Parce que durant la semaine, vous entrez en compétition avec l’actualité du jour (qu’on appelle communément dans le milieu hard news), notamment la politique, l’actualité judiciaire et les nouvelles économiques. Pour les médias, tout est une question de priorités dans leur « line-up », l’ordre des nouvelles à diffuser.
Même si les téléspectateurs et les lecteurs sont moins nombreux au rendez-vous la fin de semaine, vous devez voir la réalité en face : mieux vaut une excellente couverture un dimanche avec un impact médiatique qu’être relégué dans un encart en page 40 dans les journaux durant la semaine (et être à peine repérable au premier coup d’œil).
2) La même nouvelle rapportée contient souvent plus de contenu.
Imaginons ensemble un scénario. Prenez un journaliste de la presse écrite. Faites-le couvrir le même événement le dimanche matin à 11h00 et le mercredi matin à 11h00. Pour le même sujet, l’article rédigé le mercredi a de fortes chances d’être moins exhaustif et d’avoir moins de contenu que celui préparé le dimanche.
Pourquoi? Parce qu’il y a peu de nouvelles à couvrir la fin de semaine. Le journaliste a généralement plus de latitude pour aborder le sujet de son affectation et faire le tour de la question.
Vous trouvez ce raisonnement simpliste? En 5 ans de métier comme journaliste, il y a de nombreux sujets que j’ai couvert la fin de semaine que mes patrons ne m’auraient jamais envoyé couvrir en pleine semaine!
3) Vous augmentez vos chances de faire l’objet d’une couverture à la télé.
Faire l’objet d’un reportage à TVA ou à Radio-Canada, c’est avoir un impact médiatique significatif. Si votre sujet est ignoré par les réseaux de télévision la semaine, vous augmentez vos chances de faire l’objet d’une couverture télévisée, que ce soit dans votre région ou partout dans la province.
Par exemple, si vous êtes à la tête d’une fondation et que vous organisez une campagne de sensibilisation, vous devez absolument miser sur le dimanche pour déployer votre sortie médiatique. Le dimanche matin, lorsque c’est pertinent, les réseaux LCN et RDI accordent du temps d’antenne aux causes qui touchent le public et invitent « le porte-parole de la semaine de sensibilisation » en entrevue en studio. Si vous attendez au lundi matin, il sera trop tard…
Sortie médiatique le dimanche : ce que vous devez aussi savoir
Vous me voyez venir… Il y a des nuances. Voici trois facteurs que vous devez tenir compte avant de prendre une décision :
1) Plus de visibilité ne garantit pas plus d’impact médiatique.
Un dimanche, ça reste un dimanche. Les gens sont souvent moins réceptifs à l’actualité. Ajoutez une belle journée ensoleillée au menu et hop, vous venez de perdre une bonne partie de l’auditoire de RDI et de LCN. Un de mes clients souhaitait ouvertement de la pluie pour les journées de ses annonces la fin de semaine!
2) Des salles des nouvelles sont fermées et des journalistes sont en congé.
Dépendamment de la région où vous habitez, vous devez vous assurer que les médias couvrent l’actualité la fin de semaine. Par exemple, à Sherbrooke, seule la station de Radio-Canada offre un bulletin régional la fin de semaine. Dans d’autres villes, les médias locaux font relâche la fin de semaine.
Oui, des journalistes demeurent « stand-by » en cas d’urgence dans plusieurs régions, mais ils se déplaceront uniquement pour un fait divers majeur à couvrir. D’autres journalistes, qui sont en fonction, ont uniquement le mandat d’alimenter en contenu leur « maison mère » à Montréal et non de couvrir l’actualité locale.
3) Le contenu fait foi de tout.
Choisir le dimanche pour effectuer une sortie médiatique n’est pas automatiquement un gage de succès : comme tout le reste, tout est une question de contenu.
Avant d’encercler une date dans le calendrier pour votre sortie médiatique, vous devez revenir à des questions de base :
- Votre sujet intéresse-t-il les médias, et ce, même un dimanche?
- Votre public cible sera-t-il au rendez-vous le dimanche?
- Votre annonce aura-t-elle vraiment plus de visibilité qu’en semaine?
- Est-ce vraiment une nouvelle d’intérêt public?
- Quel est votre objectif de communication?
- Quel est le message que vous souhaitez transmettre?
- Choisir le dimanche, est-ce pour vous la meilleure stratégie?
En terminant, la réussite de la « stratégie du dimanche » dépend aussi du travail de la personne en charge de relancer les médias. Le relationniste désigné doit être proactif, effectuer des démarches dès le jeudi précédent l’annonce et surtout parler aux bonnes personnes dans les salles de nouvelles. Autrement, c’est un coup d’épée dans l’eau.
Même le dimanche, ce n’est pas qu’une question de stratégie. L’exécution compte pour beaucoup dans la réussite (ou non) de votre sortie médiatique. Et n’oubliez pas que vous ne serez jamais, comme en semaine, à l’abri d’une éclipse médiatique…